Définition : comment saisir le concept d’intériorité citoyenne ?

Opérer une transformation de soi pour entrer en résonance avec l’autre et le monde…

Au premier abord, le concept de l’intériorité citoyenne peut sembler un peu paradoxal. Ne sommes-nous pas en train de mêler deux éléments antithétiques ? Au contraire, Thomas d’Ansembourg, psychothérapeute et formateur certifié en CNV (Communication NonViolente ©), propose une définition audacieuse de cette transformation de soi, essentielle pour entrer en résonance avec l’autre.

Aux origines de l’intériorité citoyenne, un cheminement intérieur atypique !

Thomas d’Ansembourg est avocat. Il vit à toute vitesse, hors de lui-même, loin de son élan de vie. C’est alors qu’il se met à travailler avec les jeunes de la rue, à les écouter et à se rendre compte de leurs besoins. Sa transformation est entamée : il réalise que pour être proche de ces jeunes et les comprendre il a vraiment besoin d’apprendre à être proche de lui même et à se comprendre.

Il entre en thérapie, décide très vite de devenir thérapeute et se forme notamment à la Communication NonViolente© aux côtés de son fondateur Marshall Rosenberg. Depuis bientôt 25 ans il se consacre à l’enseignement de la connaissance de soi au service de la relation à l’autre de par le monde. Il plaide pour que ces clés et pratiques figurent dans tous les programmes scolaires, avec autant d’évidence que lire, écrire et calculer.

Un cheminement atypique, qui l’a amené à se poser la question de la citoyenneté et à rassembler deux sphères qui paraissaient relativement incompatibles : l’intime et le public. Car selon Thomas d’Ansembourg, le fait d’accéder à une intériorité transformante est une condition sine qua non pour développer sa confiance en soi, en l’autre, en la vie, et pouvoir enfin mettre ses talents au service de la communauté.

Comment comprendre l’intériorité citoyenne ? Petit essai de définition !

Pour Thomas d’Ansembourg, l’intériorité est un espace de ressourcement intime que nous pouvons apprendre à ouvrir et à nourrir au cœur de nous même avec au moins trois bénéfices :

  • Regarder et voir autrement : ce que j’ai vu et entendu n’est qu’un aspect de la réalité,
  • Remettre en question nos automatismes que nous prenons souvent pour de la spontanéité et revisiter nos système de pensée qui peuvent se révéler être des enfer-mements, coupés de la vie,
  • Puiser dans cette ressource dont nous parlent toutes les philosophies et traditions quelque soit le nom qu’elles lui donne : inspiration, élan de vie, Souffle, Grâce, Esprit…

La citoyenneté, elle, est notre appartenance responsable et donc discernante aux groupes dont nous faisons partie, du plus petit (couple-famille-quartier-village…) au plus grand (l’humanité- le monde vivant- la planète…).

L’intériorité citoyenne est donc notre capacité à développer la connaissance de soi et l’ancrage dans nos valeurs profondes, l’inspiration et la créativité, la bienveillance et la capacité d’empathie, la recherche de sens et le goût de la responsabilité au service de la vie commune.

Thomas d’Ansembourg explique notamment que les personnes qui se sont progressivement éloignées de leur élan de vie se trouvent confrontées à des sensations négatives telles que la frustration, la colère, l’impuissance ou la tristesse. Leurs tensions peuvent rejaillir sur leurs proches, leurs enfants, leur conjoint, leurs employés ou encore leurs collègues.

Exemple : une personne qui ne sait pas comment traiter son insécurité et a fortiori ses angoisses aura tendance à tout contrôler, une autre qui ne sait pas comment écouter son mal-être pour mettre en place un processus de transformation aura tendance à se poster en victime qui se plaint de tout sans se mettre en doute. Ces attitudes sont épuisantes pour son entourage. Et bien sûr, celle qui ne sait pas comment transformer sa colère en démarche constructive aura tendance à la faire exploser à la face des autres de façon destructrice. Enfin la personne qui ne sait pas comment dire non à temps et à la bonne personne, aura tendances à en faire trop jusqu’au burn-out…

Dès lors, l’intériorité n’est plus du seul ressort de la vie privée – les conséquences d’une intériorité malmenée sont trop lourdes pour la communauté. Face à l’épidémie de violences (notamment institutionnelle), dépressions, burn-out, addictions diverses, solitude, suicide, stress, etc. l’apprentissage de clés de connaissance et pacification de soi relève désormais de la santé publique.

Découvrez l’intériorité citoyenne en application !

Mais comment avoir accès à cette intériorité transformante selon l’expression consacrée par Thomas ?

Il existe fort heureusement des outils, des pratiques et des processus pour la découvrir et l’alimenter au quotidien.  Ces derniers sont nombreux, variés (chacun peut trouver ceux qui lui conviennent) et efficaces. Ils sont malheureusement encore largement méconnus du grand public et de nos dirigeants (c’est les thème du livre « La Paix ça s’apprend » co-écrit par Thomas d’Ansembourg et David Van Reybrouck, sur lequel nous ferons un prochain article).

Voici déjà quelques clés pratiques pour s’ouvrir à l’intériorité transformante : 

  • Changer son rapport au temps : pourquoi courir ? Parce que tout le monde court, je cours aussi ? Peut-être vaut-il mieux apprendre à connaître et respecter son rythme. Ralentir et faire du temps un allié plutôt qu’un ennemi qui ne cesse de nous hanter, tel le lapin d’Alice au Pays des Merveilles, cela peut s’apprendre, comme n’importe quoi d’autre, si je le décide.
  • Pratiquer la méditation : loin d’encourager l’isolement ou l’ermitage, la méditation est une discipline qui permet de nourrir la réflexion sur soi, de l’enrichir et de s’ouvrir à la bienveillance.
  • Trouver des figures d’inspiration : le « créateur de culture » est une personne comme vous et moi, mais qui s’attache à mettre ses valeurs en pratique et à réenchanter sa vie. Quoi de plus inspirant ?
  • S’extraire de la pensée binaire (soit/soit => et /et) : le fait d’ouvrir une porte n’en ferme pas pour autant les autres. Il est beaucoup plus riche et fécond de développer une compréhension complémentaire des situations pour éviter de toujours faire face à des choix cornéliens angoissants.

Plus qu’une simple transformation de soi, un enjeu de santé publique (voir de sécurité publique) de la plus haute importance !

De tous temps, la notion de citoyenneté a posé question. Dans sa République, Platon s’interroge sur la meilleure manière de former les futurs citoyens qui animeront la vie de la Cité. Thomas d’Ansembourg propose de revisiter notre dimension citoyenne en la reliant à notre cheminement intérieur. Cela paraît d’autant plus important aujourd’hui que le débat sur la « crise de la citoyenneté » s’attise depuis plusieurs années. Concomitamment, les attentats qui se sont tragiquement multipliés ces dernières années sont le symptôme du mal-être profond de nos sociétés, et donc du mal-être des individus qui la composent.

Comme l’évoque Thomas d’Ansembourg : «  Nous avons créé une société dans laquelle nous avons plus appris à compenser notre mal-être (par les addictions diverses, l’hyperactivité, les violences et maltraitances quotidiennes, l’attachement au stress et à l’affrontement…) qu’à nourrir notre bien-être profond, généreux et contagieux (…). Devant les enjeux d’aujourd’hui, le développement personnel psycho-spirituel profond est la clé du développement social durable».

Thomas d’Ansembourg